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mercredi 24 juillet 2024

Monstres / Qui est le monstre ? Une déflagration nécessaire !

 Monstres/Dans le chaos du monde et l'incapacité à nous comprendre les uns les autres, qui est le monstre ?

Vu à La Salle Tomasi, La Factory




Une déflagration nécessaire 

Quatre  amis qu'on devine proches, dans la vingtaine, fêtent la fin de leurs études en art dramatique. L'un, Noé, semble opter pour la mise en scène. Ils sont tous passionnés, obsédés même par l'avenir qui  les attend. Ils veulent désormais travailler ensemble. Noé, s'autodésignant leader d'un projet, s'enflamme et rêve sa distribution idéale. Il veut écrire sur simone scwartz-Bart   et son époux, mettre en scène le travail de Simone, même. A priori, ils sont tous partant pour le projet. Cependant, l'obsession de Noé qui veut réaliser sa vision, commence peu à peu à heurter certains membres de l'équipe. A l'Euphorie de la fête, succède le questionnement qu'ils avaient jusqu'ici sans doute ignoré, inconsciemment ou à dessein de maintenir une unité d'opinions et de ressentis présumés gages d'une amitié totale et absolue telle qu'on la vit à 20 ans.

Voilà le moment de faire un détour en résumant la vie et l'oeuvre de Simone Schartz-Bart, née Simone Brumant. Intellectuelle caribéenne née en Guadeloupe, elle fait très jeune une rencontre amoureuse décisive pour son parcours d'écrivaine : elle tombe amoureuse et épouse André Swartz-Bart, juif blanc installé en Guadeloupe ayant été traumatisé et touché dans sa chair par la déportation. Leur premier opus est une oeuvre à quatre mains : Un plat de porc aux bananes vertes. Les deux continueront de travailler ensemble autant que séparément. Simone, notamment, écrira une pièce de théatre titrée Mon Beau Capitaine, dont on peut penser qu'elle est l'oeuvre que Noé désire mettre en scène avec ses amis Amédé et Angèle dans les rôles principaux, alors que sa troisième amie, la turbulante et bouillonnnante Sara se verra attribuer le rôle de l'oiseau conteur.

La distribution semble satisfaire tout le monde. Angèle, française des antilles, tient le rôle titre et Noé ne comprend pas son manque d'enthousiasme. Amédé fait au mieux, essayant de ne froisser personne et la dernière - Sara - se satisfait de ce rôle étrange que Noé lui donne. Au court des répétitions, la question de l'appropriation culturelle va s'imposer, infectieuse, et l'on constatera qu'à partir de quatre désirs de justice, quatre visions de la justesse d'une mise en scène d'une texte écrit par Simone Schartz-Bart, femme noire, par un jeune homme blanc, fait exploser le consensus de surface qui semble lier la troupe, son amitié, sa vision politique de l'art. Le soubassement des dissensions est subtil, individuel et peu dogmatique. Ce choix nous permet de comprendre la subtilité des ressentis que l'on peut balayer un peu vite derrière une notion ou un concept tel que celui d'appropriation culturelle. Ce qui est particulièrement intéressant dans la pièce Monstres c'est que les revendications de chacun arrivent sous la forme d'éclats sentimentaux liés au passé récent des uns et des autres, pas seulement au passé colonial. Ainsi, aucun des personnage ne livre un discours pré-construit, au contraire, chacun se dévoile dans ses étonnements. Angèle questionne son père car elle ne comprend pas pourquoi, dans sa famille, personne ne parlait créole. Amédée n'est pas insensible à la cause noire mais il est surtout torturé par le fait que sa mère, haïtienne, n'ait pas voulu le rencontrer après l'avoir abandonné. Les blessures et les recherches de réponses se confondent parfois, se mélangent si bien que chaque protagoniste a une voix propre qui n'est pas fermée à l'autre et l'isole pourtant dans sa propre pensée, ses propres réflexions et ses blessures. Ainsi Sara n'en parle guère mais elle se sent prise en étau entre la mémoire de sa bubele qui voudrait qu'elle continue de perpétuer le yiddish et son désir d'être mille autres, elle mais pas seulement, c'est justement pour cela qu' elle a voulu devenir commédienne: elle veut jouer jouer, jouer et pas que des rôle de juive, non mais ! Angèle comprend aussi ce point de vue, ce qui la gène c'est qu'elle voudrait peser dans le renversement des forces en présence et la dissolution de la domination culturelle. Elle voudrait être celle qui mettra en scène les mots de Simone Swartz-Bart. Et Noé dans tout ça ? Noé ne sait plus tellement s'il a une valeur intrinsèque, s'il vit par procuration les questionnements ethniques et féministes de Simone où s'il est "quelqu'un, quelque chose", ni homo ni hétéro, à demi breton à demi alsacien. N'a-t-il aucune souffrance historique a revendiquer ? N'est-il rien ni personne, éternellement condamné à ne créer qu'à partir de sa propre matière "autorisée" ?

Bien évidemment rien n'est aussi simpliste dans ce choral d'identités encore meubles et déjà profondément pensantes. Jamais cette complexité n'est gommée au profit d'un motif plus harmonieux, se prétant mieux au théâtre. Les conflits sont internes autant qu'externes et le jeu explosif des comédiens qui habitent leurs personnages de façon remarquable ne se paie pas d'effets faciles. On les voit nus dans leurs bontés comme dans leurs égoïsmes et surtout on pressent déjà tout le poids de leur carrière d'artistes à venir.

Car après tout il s'agit bien de cela, créer. A partir de quoi et comment, qu'elles sont les règles....Y-a-t-il des règles ?

Ce qui m'a particulièrement plu dans le projet de Elisa Sitbon-Kendall c'est l'ouverture du propos et sa façon extrêmement immersive de nous faire participer à la conversation de ces 4 amis. Muets nous sommes, bien sûr, c'est un peu le métier du spectateur, néanmoins nous sommes inclus dans le débat, qu'il s'agisse des tentatives d'apaisement ou des montées hostiles. Le sujet, traité à hauteur d'humain, est à notre portée. La présence de Noé, notamment au début, dans le public, est une invitation à ne pas rester en retrait, selon moi. D'ailleurs nous étions arrivés dans la salle alors que tous les quatre étaient déjà en train de vivre et de féter ce qui aurait du n'être qu'une étape heureuse vers la vie d'adulte mais sera peut-être la fin d'une certaine idée de l'innocence.

De plus la mise en intrigue des destinées croisés n'a pas été inutilement complexifiée afin de coller à une nécessité éthique propre aux sciences humaines qui n'aurait pas eu sa place sur scène. Ainsi, on pourra postuler que les 4 amis, certes ne sont pas tous issus de minorités mais ils sont tous, d'une certaine manière, privilégiés, puisqu'ils ont pu faire une école de théâtre et que désormais, leur projet de vie va tourner sinon autour d'un rêve du moins d'un choix de vie : la création sera leur métier. Ajouter des problématiques certes réalistes mais complexes aurait pu alourdir le propos, le diluer. Ici ce n'est pas le cas. La dimension intime de l'appropriation culturelle, sa définition même restent au centre du sujet, avec ses corollaires directes : quid de l'identité hors du passé et de l'outrage fait aux ancêtres ? Quid du partage des ressources artistiques ? Suis-je mon obsession ou mon obsession est-elle moi ? Les bonnes intentions font-elles une bonne justice ? L'art est-il au dessus...de quoi...de tout ?

Enfin, la variété émotionnelle de l'incarnation d'une jeunesse "éveillée" m'a parue extrêment riche. Ces acteurs dégageant une énergie concentrée mais très différente qui ne correspond pas forcément aux clichés habituellement représentés sert magnifiquement le propos de la pièce.

Je concluerai en essayant de ne pas dévoiler ni le climax ni la fin ouverte, et en rappelant que les tourments de certains protagonistes, dont Noé lui-même, ne sont pas très éloignés des questionnements d' André Scwartz-Bart, qui, lui même, n'était pas considéré comme étant légitime pour évoquer la condition de la femme noire...

Voilà un très bel opus, une tragédie initiatique contemporaine qui dépeint l'enfance de l'art et met en avant des intellectuels qui ne sont entrés à la bibliothèque de France qu'en 1985 et méritent peut-être qu'on leur accorde un certain intérêt. Le parcours de Simone Schartz-bart, plus long, méritait bien de sortir de l'ornière de l'université et d'être mis en lumière.

Si la pièce est programmée près de chez vous, vous savez ce qu'il vous reste à faire.

Quant à moi, j'attends avec impatience la parution du texte, assez subtil pour souffrir une lecture à postériori. Et j'avoue que je me suis attachée à ces personnages au points que j'aimerais bien suivre leurs aventures dans le théâtre du 21ème siècle. Que deviendront-ils, Angèle, Amédée, Sara et Noé ?

Une déflagration théâtrale nécessaire, un récit initiatique qui émeut et bouscule !

Adeline AVRIL

Le son des planches/théâtrogène

Autrice : 

Elisa Sitbon Kendall

Comédien·nes : Bonnie Charlès, Jacques-Joël Delgado, Olenka Ilunga, Kerwan Normant

Régisseur·se : Elise Lebargy

Attaché·e presse : Lynda Mihoub

Chargé·e de diffusion : Yves Ostro, Edith Renard

Metteur·se en scène :  Elisa Sitbon Kendall, Gaïl-Ann Willig



mardi 23 juillet 2024

Constellation Bobin Leprest : Entrez en Poésie avec Alain klingler

Constellation Bobin Leprest

Vu au Théatre Le Verbe Fou

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Alain Klingler, metteur en scène, musicien, homme de théâtre, a le rafinement singulier de ces ambassadeurs de la pensée capable de vous ramener à des considérations hautes quand bien même vous seriez perdus dans des tâches triviales de consommation inutile, faisant par exemple la queue à Auchan.

Ce n'est pas le genre à éructer "reprenez-vous la vie c'est autre chose", en vous culpabilisant de faire les soldes. Il arrive, il s'asseoit à son piano, la silhouette légère, le geste précis et il vous laisse entrevoir la beauté des choses en laissant entendre qu'il n'est pas trop tard pour entrer en poésie, jamais trop tard, même si c'est comme ça, une heure de temps en temps.

Le voilà donc assis à son piano, sur une scène transformée artistement en bibliothèque à la fois frugale et incisive. On pourrait penser que cet homme est déjà sur son île déserte et qu'il a amené son essentiel : son piano, ses livres de Bobin, sa voix et sa mémoire de Leprest.

J'avoue que je ne connaissais pas Leprest avant de préparer mes dossiers pour le festival à venir. Honte à moi. Merci Mr Klingler, c'est réparé !

Dans mes chroniques de spectacle précédentes j'ai beaucoup parlé de magie, d'apparition. Ici, en admettant qu'on retrouve une forme de sorcellerie propre à la littérature comme à la musique, le procédé est pourtant différent. On ne fait pas apparaître des étoiles sur un drap de velours, mais on ré-apprend à lever la tête pour regarder la voute céleste et regarder si ce soir les étoiles sont visibles ou pas. On fait avec ce qui est. On est dans le vrai et dans l'infime. La feuille de sauge, la note de piano qui dure. C'est un de ces moments où l'art du spectacle, en harmonie avec les auteurs présentés, s'intéresse à la vie même et ne prétend en rien lui faire concurrence.

Deux auteurs qui s'interressaient au métier de vivre et peu à celui de brasser de l'air. Bobin, fuyant la notoriété, peu mondain, plutôt chrétien bien que peu dogmatique. Il se méfiait moins des mendiants que des publicités 4 par 4 qu'on nous impose en milieu urbain.

Leprest, chansonnier ou poète, communiste et athée, préoccupé d'humanité, regardant lui-aussi la vie à la loupe. Dans un extrait d'émission littéraire il confiait à Lefait qu'étant un grand marcheur, il écoutait beaucoup les gens et il avait l'impression que les gens écrivaient en fait ses/ces chansons.

Cette inadéquation entre une sensibilité exacerbée peu compatible avec le monde tel qu'il s'impose, on la retrouve chez les deux artistes qu'Alain Klingler nous permet de découvrir à l'aune de thème tels que l'amour, l'humilité, la liberté de choisir une vie hors norme. Bien sûr on la retrouve chez Klingler aussi. 

De même, l'on ne se peut s'empêcher de comparer l'infatigable Klingler, moins connu que certains de ses pairs et pourtant si puissant dans sa création, jamais à cours d'une idée, vivant probablement lui aussi "en poète" (petit clin d'oeil à C).

Plus qu'un spectacle, Klingler nous a convié à un moment de partage d'une authenticité troublante et il rend à ces deux auteurs un hommage qui est tout sauf princier : il nous tire jusqu'à eux, on devient camarades, tous sous le même ciel, tous dans la même terre. Pendant une heure on aura ressenti les choses dites minuscules avec une acuité d'une force inouie, grâce à Alain Klingler, son talent, son intelligence et son humilité. Et on aura compris comment Bobin et Leprest ont chacun à leur manière tissé une oeuvre hors du temps qui célèbre la vie plus grande, plus intense, plus profonde que celle qu'on nous propose.

Si ce récital littéraire et poétique passe près de chez vous, offrez vous ce compagnonnage, cet excédent de vie.

Entrez dans la constellation Bobin-Leprest.

Adeline Avril

lundi 22 juillet 2024

Piaf, Olympia 1961

 Piaf, Olympia 1961


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Lorsqu'elle est passée l'année dernière à Avignon, dans un journal  quelqu'un a écrit : "Nathalie Romier n'interprète pas Piaf, elle l'incarne". Je suis verte de jalousie. J'aurais aimé pouvoir l'écrire moi-même. Car c'est tout à fait juste. Mais voilà, par la magie d'un oui-jà ou simplement grâce au talent de Nathalie Romier et sa passion pour la môme, je ne suis pas restée sans mots.

En 1961, la môme n'est pas dans une état de santé magnifique. Quand son ami de toujours, Bruno Coquatrix, lui demande de l'aide pour relever l'Olympia, elle ne se dérobe pas, pourtant. S'il est bien un rendez-vous que Piaf ne rate jamais c'est celui qu'elle a avec le public. Elle fera merveille pour son ami et sauvera l'Olympia avec sa grâce et son talent renouvelés, à la fois trop humaine et plus grande que la vie.

L'année dernière, j'ai raté le spectacle de Nathalie Romier avec regrets. Lorsque j'ai lu la presse il en est ressorti de nombreuses expressions liant sa prestation à l'univers surnaturel. Elle "ressuscite Piaf", ai-je lu notamment en plus de l'incarnation que je soulignais en entrée. Je me devais d'être là cette année.

Eh bien, je ne suis pas ressortie déçue de mon spectacle en Juillet. Bien au contraire! A croire que les journalistes, parfois, ont raison ! 

J'étais absolument médusée comme si moi la petite quinqua du 21ème siècle je venais de faire l'objet d'un tour de quelque magicien d'autrefois. Il faut dire, qu'il n'y a pas que la voix et cette convulsion aigrelette qui vibre au dessus de tout, qui signe l'évocation de Piaf, mais il y a aussi toute la posture de Nathalie Romier qui reproduit à la perfection cette gestuelle si singulière, si précise que seule Piaf pouvait "danser" en quelque sorte. Petite Dame hiératique dont les bras s'envolent au dessus et tout autour de son cou penché par les épreuves, la voilà ressurgie telle qu'en 1961.

Les photos d'archives qui passent discrètement derrière soulignent la dimension cérémonielle un brin rituelle de ce fameux concert de 1961 et tout l'abandon de l'artiste, offerte au public et peut-être au ciel pourquoi pas ?

Il faut dire que nous possédons  tous ou presque ce merveilleux album au portrait torturé, violet comme une flamme dont les morceaux sont devenus mythiques et contenaient déjà à l'époque la braise d'un feu éternel.

La foule, Les Blouses Blanches et tous ces morceaux entêtants comme des invocations qu'on ne chante pas à moitié mais avec toute la poitrine, comme hypnotisés. Puisque Piaf était nous tous et que désormais nous lui devons quelque chose.

Oui, c'est ainsi que je suis sortie de ce spectacle, ce récital immersif durant lequel j'ai vu Nathalie Romier possédée par Piaf, répondre "Merci Madame" aux compliments qui l'attendaient dehors sur un ton poli et ancien. Comme Piaf elle-même, encore un peu là avant que Nathalie ne reprenne des couleurs. Elle était possédée, moi j'étais envoutée.

"Merci Madame".

Lorsque nous sommes rentrés, le disque vinyl ressorti était sur une chaise. Nous n'aurions pas été plus étonnés que cela si Edith nous avait fait un clin d'oeil au milieu de la barbouille.

du 29 juin au 21 juillet  relâche les 4, 11, 18 juillet
16h00  1h10
AU B.A THÉÂTRE 
Salle : Salle 1 

mercredi 17 juillet 2024

Valkyrie

 Valkyrie





J'ai eu la chance d'assister à une interview d'Ava Baya , j'espérais en savoir davantage sur ce mystérieux objet théatral fort attendu. Attendu de par la célébrité montante d'Ava Baya, comédienne, chanteuse mais aussi par son sujet. Je n'ai pu m'enpêcher d'imaginer que je me trouvais en présence d'une version off du projet subversif de Rebecca Chaillon qui avait fait scandale l'année dernière.

Mais Ava Baya a laissé planner le mystère et elle a bien fait.

En effet, à mots couverts, on prédisait dans le programme que les amazones allaient envahir le public pour fêter l'avènement d'un possible matriarcat.

Féministe, bien sûr que ce spectacle est féministe. Mais c'est davantage un féminisme d'affirmation et d'approfondissement individuel qu'un féminisme de combat qui se cherche un ennemi. Voilà déjà une belle surprise. Non que la cause ne mérite pas le combat, au contraire, mais nous voilà revenus au théâtre, et non sur un ring.

Donc malgré tout le respect que je dois à Rébecca Chaillon et son théâtre de l'affrontement, j'avoue que le choix opéré par Ava Baya et Pierre Pfauwadel m'a séduite. Le festival off va sur sa fin, donc vous verrez ce spectacle ailleurs en tous cas je vous le souhaite, car le propos, complexe, franc du collier, mélant uchronie (retours sur la Grèce antique) et présent , amène la question du comment être une vraie féministe en restant soi-même avec une auto-dérision audacieuse.

Chacune des commédiennes représente non seulement un aspect de la guerrière amazonne mais aussi un aspect de la femme contemporaine et de ses contradictions. Qui plus est, chacune est jouée par une actrice qui développe ses talents propres. Le fil rouge est la quête de soi. Chacune a son moment seule face à nous, dégagée du "groupe" qui part se chamailler "à côté", elle se confie par choix ou par accident.

Et cela fait évoluer la vision première que nous avons eu en entrant de plein pied dans une sorte de rituel payen mené comme un plan d'attaque contre les hommes.

On comprendra peu à peu que ce plan d'attaque est complexe car il s'agit d'attaquer Hyppolite -oui, celui-la même, celui qui dénonça Phèdre- qui est le fils de la Reine des amazonnes. Qui plus est, enceinte, l'une des guerrière se demande si elle ira ou non vivre avec les hommes si son enfant est un garçon. Voilà posée la vulnérabilité liée à l'enfantement charnel. Cela deviendra-t-il une force ?

Après nombre de scènes qui nous arrachent des larmes de rire et beaucoup de tendresse pour les diverses stratégies de ces filles "comme les autres" qui sont aussi "des amazones, des guerrières", nous reviendrons au mythe et nombre de questionnements seront résolus mais bien sûr, les meilleurs spectacles sont ceux qui mêlent résolution et questionnements nouveaux. Lépée est désormais entre vos mains.

J'ai beaucoup aimé la scénographie à deux voix réalisée en complicité par Pierre Pfauwadel et Ava Baya, dans cet opus qui tient en équilibre entre la tragédie grecques et la tragicomédie contemporaine. La lumière est travaillée sans ostentation mais avec finesse et l'idée de la moto-jument-cyclope, enjeu d'émancipation pour l'une, de séduction pour l'autre est une très belle idée qui coud merveilleusement ce mélange entre l'antiquité et le monde hypercarboné, saturé d'électricité. D'autant qu'Hypolite finira sa course en char....La musique est aussi un atout certain, qui participe de l'homogénité de ce chaos centrifuge tout en amenant un certain paganisme pop dans la dimension où le réel affleure.

J'ajouterai que la distribution est un régal -vraiment- et je cesse là mon enthousiasme, allez voir ce spectacle !

Adeline Avril

Vu au théatre transversal


Acteur·rices : 
Ava Baya, Guillermina Celedon, Sasoux Dosso, Laura Facelina, Mélissa Polonie, Hélène Rimenaid
Metteur·se en scène : Pierre Pfauwadel

La Compagnie LENCRE est une compagnie théâtrale basée à La Rochelle et menée par trois artistes émergents.

samedi 13 juillet 2024

Momentos de Valérie Ortiz : Un Pur moment de Grâce

 Momentos

Moments de Grâce 




J'ai vu Momentos au théâtre du Girasole et j'ai la sensation d'être restée en apesanteur durant tout le spectacle. 

Emancipée de la dimension "folklorique" sans pour autant renier la tradition du Flamenco, Valerie Ortiz, a réussi à inventer sa propre signature en acceptant que son spectacle soit traversé de tout ce qui la constitue elle-même. Ainsi on retrouvera dans "Momentos", des moments qui font penser à de la danse classique, des moments contemporains, parfois on se croirait à Broadway.

Cette magie qui lui est propre tient aussi à l'art qu'elle a de s'entourer. Même si sa grâce et sa technique irradient la scène, elle ne monopolise jamais la lumière, ce dont pourtant nul ne se plaindrait.

Place à l'Art

Elle a placé, au contraire, ses musiciens sur une sorte d'estrade et parfois l'un d'eux s'invite pour un duo de chant ou quelques pas. Notons qu'elle est entourée de grands musiciens qui passent allégrement du Flamenco au Jazz ou encore au classique et qu'il s'agisse d'une conversation entre deux guitares ou un solo de batterie, jamais l'harmonie percussive ne se dilue, jamais le grand mouvement des corps qui traverse Momentos ne se perd. Dans ce grand vent de beauté pure, Momentos nous soulève. 

Grace à la scénographie et au travail de la lumière, tantôt nous voilà accrochés aux pieds et aux chevilles qui sont comme un alphabet de poésie autant qu'une partition de pluie vibrante, tantôt au délié des poignets et des mains qui mènent leur chorégraphie propre comme des fleurs qui se déploient.

Enfin, les duos de danse, femme/homme ou homme/ homme sont d'une beauté et d'une originalité que seule une artiste comme Valérie Ortiz peut imaginer. Quand elle y joint les castagnettes on comprend toute la beauté orignelle de ce son si particulier capable de fusionner avec tous les styles de musique, tous les instruments. Les solos de chant sont sensuels et aériens, tantôt à capella tantôt accompagnés. Du début à la fin, c'est une histoire qui se déroule, une chorégraphie qui se déroule sans discours ni annonce. Nous avons fait un voyage dont on aimerait qu'il ne finisse pas encore. On devine qu'il s'agit aussi de dire l'amour sous toutes ses formes.

En standing ovation, on est debout pour remercier. Ce n'est pas du divertissement c'est une sorte de privilège que d'avoir bu à cette source qui renouvelle le corps et l'esprit comme une cérémonie sacrée. On garde en soi un peu de cette énergie qui nous a été offerte.

Adeline AVRIL

Lien vers le site du off


du 3 au 21 juillet  relâche les 8, 15 juillet
19h15  1h25
GIRASOLE (THÉÂTRE DU)
Salle : GIRASOLE (THÉÂTRE DU) 
Public : Tout public à partir de 5 ans

lundi 10 juin 2024

Les Enfants du Diable : Clémence Baron nous touche au coeur par Adeline Avril


 


Les enfants du Diable

Vu au Théâtre de l'Oriflamme

Ecrit par Clémence Baron

MES par Patrick Zard

Avec Clémence Baron et Antoine Cafaro

Au théâtre de l'oriflamme du 3 au 21 juillet à 11h30

Relâche le lundi


Et s'il était possible que les enfants du Diable prennent leur revanche sur la vie ?

Véronica, Mirella et Niki sont nés dans la Roumanie de Ceausescu et ont grandi dans le chaos qui a précédé sa chute. Alors qu’on découvrait notamment les horreurs liées à la prise en charge des enfants en général et à ceux qui n’avaient pas le bon goût d’être absolument fonctionnels selon des normes productivistes et inhumaines.

Trois enfants d’une même fratrie, trois destins, trois tragédies.

Ensemble, c’est trois !

Mirella, personnage central de l’histoire bien qu’elle ne soit pas incarnée, souffrait d’autisme et a été considérée comme irrécupérable, donc elle fut confinée dans un de ces mouroirs de l’époque, sans amour et sans hygiène et elle y a contracté le VIH.


Niki est resté en Roumanie, espérant récupérer la garde de Mirella dès que possible.

Veronica, elle, a été adoptée à dix ans par une famille française. Celle-ci pouvait accueillir Niki, mais pas Mirella.

Pour Niki, “ensemble” c’est trois ! Veronica est donc partie seule, à 10 ans, elle a choisi la vie.

De loin, son grand frère a suivi la carrière de chanteuse de Veronica, elle qui a continué de grandir dans l’amour parental de ses nouveaux parents français. Tout semble lui sourire, il se dit qu’elle les a oubliés, lui et Mirella.

Pourtant Veronica ne se remet pas de ce choix qu’elle a fait à dix ans, de ce sentiment d’avoir abandonné son frère et sa sœur Mirela. Son paradis n’est que de façade. Elle ne se remet pas non plus du fait que Niki ait refusé de venir avec elle. Il a en quelque sorte choisi Mirela dans ses yeux d’enfant. Quant à Niki, il en veut à la terre entière et son amour pour Veronica est entaché d’amertume. Alors qu’il a pu avoir enfin la garde de Mirella jusqu’au décès de celle-ci, il continue de parler à son fauteuil vide et il lui raconte ce qu’il sait du passé, du présent, il ne parle pas d’avenir. Il lui raconte ce qu’il sait de la carrière de chanteuse de Veronica, il est toujours acide et blessé.

C’est dans un moment de “dialogue” avec cette chaise vide, que nous retrouvons Niki, vivant la vie comme elle vient dans son pays d’origine.

Un jour, alors qu’il rentre chez lui, Veronica en personne se tient en face de lui, enceinte jusqu’aux yeux.

Vous vous doutez bien que ces retrouvailles tardives ne seront pas de tout repos. 


Clémence Baron, par cette pièce, témoigne pour sa sœur Mirella, autiste, qui, elle est heureusement toujours parmi nous. Elle se saisit de ce pan d'histoire dont personne n'est sorti grandi pour célébrer la pulsion de vie des victimes de la dictature. Elle célèbre la différence comme elle sait si bien le faire, sous différentes formes.

Elle nous offre un face à face singulier entre survivants. Car il y a tant de manières de survivre à l'inconcevable ! Au lieu de se perdre en discours historiques le beau duo tantôt antagoniste tantôt symbiotique qu'elle forme avec Antoine Cafaro nous donne à voir la complexité des destins et les différentes histoires que chacun peut se raconter pour faire face et avancer. Ce grand frère qui a pris à cœur des responsabilités quasiment parentales avec la plus fragile de la fratrie et cette enfant de 10 ans qui a choisi, intuitivement, la vie, sans comprendre pourquoi le grand frère ne la suivait pas en France.

Niki a cru être le seul à souffrir, s'abîmant dans l'aigreur de l'abandon. Saisira-t-il la main tendue par Veronica ? Sera-t-il encore capable de choisir la vie, l'amour qu'elle lui propose, malgré ses blessures ?

Les deux comédiens se complètent bien, chacun amenant son énergie propre. Antoine Cafaro , quasiment hiératique, enfermé dans sa boucle temporelle, ses rituels mémoriels, sa relation fantomatique avec Mirella et Clémence Baron, brulante, portant la vie et torturée mais rendue capable d'espoir. Le frère et la sœur sont deux forces qui s'affrontent, se vampirisent d'abord puis se nourrissent. Mirella veille peut-être sur ces deux là avec son bon sens tout singulier.

On sort touchés au cœur.

La mise en scène de Patrick Zard, centrée sur les ressentis complexes de personnages, ne les encombre pas d'écueils inutiles. Quelques accessoires symboliques font apparaître en creux Mirella l'absente, à la fois pierre de discorde et ciment fraternel. La lumière intimiste nous rappelle sans misérabilisme que nous assistons ici à un chemin de résurrection en somme, dans la pâle lueur d'un monde qui renaît lentement. C'est un long chemin qui mène de l'ombre à la lumière quand on a pris l'habitude de se cacher. Veronica, par son chant, va-t-elle rendre Niki à sa vie ?

Je vous encourage à venir partager ce chemin vers la lumière, un bel hommage à l'amour fraternel. Un rappel de l'histoire contemporaine à travers les oubliés des manuels, ceux qui sont pourtant de vrais héros.


Adeline Avril


Crédit photo : Philippe Hanula




https://billetterie-oriflamme.mapado.com/



jeudi 6 juin 2024

Médée La Révoltée

 Médée d’ARES, femme désirante, indéfendable ?

Nouvelle création d'Isabelle KRAUSS

Vu au Théâtre des 3 raisins en sortie de résidence





Médée n'aura-t-elle droit qu'à l’enfer qui échoit aux empoisonneuses et aux meurtrières ?


C’est la question que nous pose ce mythe. C’est aussi la question que nous pose le texte de Jérôme de Leusse, osant y ajouter la somme des questionnements contemporains sur la condition féminine.

Utilisée par un Jason l’argonaute,  cynique ou pétri de sa condition d’être supérieur d’homme, Médée revient sur ce cheminement sensuel plus que moral qui l’a amenée à tuer ses fils. Mais la pièce ne se concentre pas sur cet aspect du mythe. 

Elle revient sur ce crime aussi, bien antérieur, qu’elle a commis par amour et qui l’a fait passer de l’or des héritières à la condition de sous-être, qui l’a amenée à se trouver remplacée dans la couche de celui qu’elle a amené au pouvoir.

L’emprise, la trahison, la violence de Jason, homme tout puissant, sa traitrise magnifiée, son droit de la répudier, son mépris pour ce qu’elle est : une femme.

Le jeu d’Isabelle Krauss, qui s’inscrit dans une continuité de la tragédienne au point qu’on pourrait la comparer à certaines traditions codées japonaises, sert magnifiquement l’atemporalité du mythe et fait exister cette Médée torturée et hors d’elle au sens strict du terme par delà les codes imposées par le théâtre antique ou les grands dramaturges spécialisés dans l’utilisation des mythes à des fins contemporaines.

Médée plaide sa cause. Elle qui fut traitée de sorcière, de magicienne, et vouée aux gémonies avant même de commettre l’ultime et impardonnable infanticide, elle se rebelle contre sa condition de marche-pied, de viande-femme. Dans cette incarnation, elle ne semble rien attendre qu’une révision des conditions de sa condamnation, telle un esclave qui en appelle à réexaminer les conditions qui ont précédée le meurtre de son maître injuste. 

Le décor est surprenant, figurant une matrice aux couleurs diaprées, changeantes, on se trouve dans un nulle part qui n’est pas sans évoquer une sorte de purgatoire. Il y a quelque chose de la science fiction des années 70 dans cette scénographie qui doit beaucoup à la sur-écriture permise par le travail sur la lumière ainsi qu’à la musique entêtante et surnaturelle. De même qu’Isabelle Krauss, au visage couvert d’or a tantôt l’air lumineuse tantôt salie, au gré des jeux d’ombres  et de sa danse au milieu des pans d’une immense tenture, très belle, nous imposant sans violence une vulve géante dont Médée est tantôt la voix tantôt l’avalée.


Comment revisiter le mythe de Médée ?


Le mythe de Médée est un casse tête. Véritable victime de l’homme mais aussi de sa propre sensualité, elle représente aussi l’indéfendable, l’intouchable.

La mère infanticide. L’amoureuse plus que la mère pour être plus précis, puisqu’un mythe ne se “regarde” pas au premier degré. Nous ne sommes pas dans les tabloïds, ou sur les réseaux sociaux, à juger .

Avec ce texte, grâce à cette scénographie et à l’incarnation charnelle d’Isabelle Krauss qui rend parfaitement audible la détresse de Médée d’Arès l’on se rend sur “une autre scène” en tant que spectateur.ices, on questionne l’ensemble des verdicts qui fusent dans le monde à l’encontre des femmes, dont on juge les faits et gestes avec un regard différent de celui qui inspecte le masculin “héroïque”.

Ainsi, ce n’est pas une relecture totale du Mythe de Médée que propose le texte, mais une mise en avant de la trajectoire d’une femme qui résonne comme un réexamen de nos propres à prioris sur celles que l’on a qualifiées un peu vite de sorcières pour pouvoir les brûler sans procès. Et un questionnement sur le sacrifice d’une femme qui s’est pliée au désir de descendance de son “seigneur” alors qu’elle était peut-être faite pour une autre vie. Une femme assignée à sa nature de sous-être et donc peut-être assignée au sang, avec le crime pour tout échappatoire.

Rassurez vous, pas de #jesuismédée, de #pendezla ou autre. Le propos se tisse de façon subtile même s’il rejoint un questionnement contemporain de façon juste et surtout, ce spectacle permet de réintroduire un mythe important dans un registre philosophique et littéraire, sans la lourdeur didactique que l’on pourrait craindre.

Ici, sensualité rime avec élégance.


Musique Pierre-Marie Trilloux

MES Isabelle Krauss

Texte Jérôme de Leusse

Crédit photo : Théâtre des 3 raisins


Malheureusement, ce précieux joyau ne sera pas visible durant ce festival off 2024, il faudra attendre l'année prochaine.

samedi 11 novembre 2023

JOURNIQUE D'AUTOMNE



     Vivre dans une petite ville de province qui accueille un événement d’envergure, c’est amusant. On y a les mêmes joies et les mêmes déconvenues qu’ailleurs mais le café en terrasse augmente chaque année, chaque année il est plus difficile de se garer. Selon l’obédience de la mairie et l’air du temps, la ville compte plus où moins de miséreux visibles ou de pauvres invisibles. Il y a plus ou moins de problèmes de salubrité et de sécurité, il y a plus ou moins d’arbres, plus ou moins de travaux, de transports en commun, de mobilité décarbonée et d'évènements plus ou moins culturels et inclusifs.

Mais surtout, il y a des célébrités. Il y a en a tant qu’à force vous les voyez à peine parce qu’à dire vrai, à Avignon, à moins de recevoir Brad Pitt ou les BTS, personne ne va s’attrouper en hurlant autour d’un autre nombril que le sien, où alors c’est que j’ai manqué des événements mémorables. Un footballeur aurait davantage de succès, pourtant, Avignon, c’est la ville du théâtre.

Mais voilà, les stars du théâtre ont le glamour discret et les stars de la télévision ou du cinéma qui font aussi du théâtre, on les ramasse à la pelle et souvent, elles se ramassent elles-mêmes. Bref, on ne les voit même plus, à force.

Non que la célébrité nous laisse de marbre. Il n’est rien de plus agréable pour une star de la télé que de venir ouvrir un théâtre par chez nous. Elle sera assurée de trouver une cour dévote et sincère, et un public captif espérant des invitations bien que n’étant d’aucune presse. Le public payant c’est plutôt en été. Heureusement, les consommations de liquide aident à combler le manque à gagner. Car la plupart du temps les vedettes comme les stars et même les phénomènes médiatiques, non seulement font caca comme vous et moi, mais ils ont aussi des charges à payer, d’autant que c’est un peu comme les grosses berlines d’autre fois : elles brillaient plus que votre petite voiture mais elles demandaient aussi plus d’entretien et engageaient des frais exorbitants. Faisant partie des pique-assiettes du show-bizenesse décentralisé, je m'achète ici un peu de crédit-empathie.

Ainsi, Avignon reçoit non seulement des “pointures” du théâtre dans le in comme dans le off, mais elle reçoit aussi des personnages de feuilletons quotidiens, de films policiers de terroir, des humoristes qui sont passés à la télé, des musiciens qui sont jurys dans des radio-crochets. Il y a aussi beaucoup de gens qui sont cousins/cousines d'unetelle qui est célèbre, et ne nous mentons pas, c'est un peu le seul moyen que les entrepreneurs du spectacles ont de faire venir des vauclusiens en centre ville. Je pense qu’un jour on recevra aussi des personnages de jeux vidéos et de dessins animés. Enfin j’espère ! J’aimerais bien savoir si Albator a bien vieilli, si les lapins crétins sont aussi crétins dans la vraie vie, si Totoro a maigri, bref, la vie, la vraie….

Avignon serait beaucoup moins drôle sans ses célébrités de tous les genres et de toutes les tailles. Les amis des célébrités, sont un peu, aussi, des célébrités ! Et nous on est tous l'ami de l'ami d'une amie de quelqu'un qui, à un moment de sa vie, a connu quelqu'un qui a rencontré Michel Druker ou la famille de Gérard Philippe! CQFD

    Les politiques y viennent aussi. Il y en a de tous les bords même s’il faut bien avouer que la culture assume franchement sa préférence pour les subventions de gauche, dans la mesure ou les subventions de droite, déjà, on ne sait pas très bien si ça existe (ouh la menteuse !) et que la culture, c'est de gauche, c'est un horizon indépassable, cette gauchité, me dit-on dans l'oreillette. En tous cas, si vous cherchez à financer une performance dansée et criée avec des femmes transsexuelles nues qui tapent sur des bambous et lancent des chaises sur le public, c'est plus facile avec une mairie de sensibilité dite "progressiste". Surtout si il y a dans votre projet une dimension sociale inclusive voire pédagogique ou écologique (démerdez-vous!)

La politique, c’est le sujet qui fâche, disait ma grand-mère… Plus maintenant. Maintenant on se fâche sur les réseaux sociaux, mais dans la vraie vie, on est très chouette, souriant, calme, liquide et affamé, à part quelques hurluberlus encore abonnés à Spoutnik qui pensent que la politesse ce n’est pas un lubrifiant social qui aide à vivre ensemble mais un ensemble de conventions bourgeoises aliénantes. Ceux là, on les reconnait vite, en général ils dirigent des structures à vocation socio-culturelles et ils ricanent comme des cow-boys regardant un pied tendre entrer dans un saloon dès qu'un new guy is dans la ville. Oui je sais j’ai trop lu Lucky Luke et j’ai une passion pour Jolly Jumper. Eux, d'accord, ce ne sont pas des stars, mais bon, quand même, respect, ce sont souvent des darons. Ils ont fini par devenir les notables qu’ils rechignaient à adouber dans leur jeunesse. Pas très souriants mais utiles parce qu’eux, ils sont ici à l’année. Quand il fait froid, c’est dans leurs chapelles à pendrillon, leurs cinémas engagés qu’on voit du feu et qu’on entre l’hiver.

Question politique, il y a aussi le sujet “faut-il rire ou pleurer ?” qui récure (il est récurrent) : ce sont les anciennes célébrités qui se sont recyclées dans la polémique pour ne pas dire le platerrisme/terreplatistme et autres inquiétantes bizarreries en isme. Deux gros dossiers nous occupent en juillet, à Avignon: l’un porte des cuissardes, l’autre est à demi-breton. Eux aussi, autrefois, ils avaient du talent. Ils veulent revenir croquer la bonne pomme de la cité papale. Je ne les nommerai pas, je préfère encore dire Candy man trois fois ou Voldemort Voldemort Voldemort…. En jetant du gros sel par dessus mon épaule....

Bref, à Avignon, on ne s’emmerde pas tous les jours, surtout si on a l’insigne honneur d’être invité aux conférences de presse. C’est facile, il y a si peu de presse, qu’il suffit d’ouvrir un blog (dont acte) et de prouver qu’on est bien à la retraite (là, j'avoue, ça fait du bien : je suis trop jeune), ça passe crème !

Donc, si vous aimez les conférences de presse ne vous gênez pas, d’autant que les 3 véritables (journalistes porteurs d'une authentique "carte de presse") de la région ont souvent bien mieux à faire. Donc il y a toujours des places pour écouter les politiques de toutes les strates des territoires venir très maladroitement expliquer que x ou y est un ami de longue date et qu’on lui a pour son talent indicible (d’ailleurs on en parlera pas) alloué quelques centaines de milliers d’euros. Là, c’est la course, tous les présidents du territoire se battent pour avancer le chiffre le plus fou, comme s’ils le sortaient eux-mêmes de leurs poches. Et il faut savoir que c’est toujours le plus mauvais orateur qui parle le plus longtemps et essaie de faire des blagues en tutoyant l’artiste ou l’organisateur ou patron de théâtre qu’on était venu écouter pour connaître enfin le programme. C’est cette personne, d’ailleurs, la seule professionnelle, artiste le plus souvent, qui parlera le moins. Mais c’est aussi la personne dont les autres zozos avaient besoin pour appuyer sur la télécommande qui déclenche le Powerpoint. Dans les arts vivants il faut être polyvalent. Le même vous serrera la pince en ayant l’air de vous avoir reconnu alors que c’est la première fois que vous venez et vous servira même peut-être une coupette de champagne (et fera même les vitres après si ça se trouve) pendant que les stagiaires se fichent intelligemment de la gueule des invités et checkent leurs Iphones.


Oui, vivre à Avignon, c’est intéressant. Parce qu’il y a non seulement les vraies célébrités (de toutes tailles de notoriété…) mais aussi des tas de personnes qui fréquentent les célébrités et se selfisent avec ou pas mais le font savoir. Certains se déguisent même en célébrités. (Combien de faux Jean-Michel Ribes peut-on croiser en une journée de festival ?)

Combien de faux Philippe Caubère saluerez vous tout en passant à côté d’un Denis Lavant qui se fond dans les murs, d’une Myriam Boyer qui prend des selfies dans la rue des teinturiers, l’air de rien ? Ariane Ascaride qui est comme à la maison mais ne tient pas à être reconnue ? Puis-je évoquer certaines attachées de presse qui couinent plus que leurs protégés ?

Qui aura reconnu l'athlétique boss de la comédie française marcher d’un pas rapide en claquette ? Jacques Weber, lui est trop grand, trop Jacques Weber, on ne peut pas le rater.


Ne me demandez pas de parler des stars de la téléréalité, même celles qui finissent par être sur les affiches pour un stand-up ou un seul en scène, je ne les connais pas. Et comme dirait Paul Ricoeur, si on ne connait pas on ne reconnaît pas (ici, c'est la seconde intellectuelle, la seconde pas plus, promis)


Donc voilà, à Avignon, il y a des stars, des fausses stars et aussi beaucoup de professeurs qui viennent faire des stand-up ou des “seuls en scène” “pédagogiques”. Des youtubeurs, aussi, parfois les deux en même temps. Parfois ce ne sont pas les pires. Parfois. Il y a aussi les grands traumatisés: qui a survécu à un tsunami, qui a survécu à des micro ou des macro-agressions, qui a sa maladie orpheline, qui s’est mis à la boxe, qui a perdu son chat, qui a changé de sexe, qui a fait un burn-out ou bien tout à la fois… Honnêtement, je ne sais pas si c’est l’effet "réseaux sociaux", avec les citations de Nietzsche qui nous donnent à tous l'impression d'avoir soudain une agrégation de philo, mais c’est clair, le savoir est devenu sexy, et la dimension pédagogique tient le haut du pavé. Les témoignages et les biographies de grands personnages, voilà aussi deux niches tellement grandes qu’on ne sait plus si on doit les appeler des niches tant ces niches sont exponentiellement élastiques.


Donc si vous êtes un prof malade et/ou traumatisé qui cherche à se reconvertir en saltimbanque tout en s’identifiant à…Marie Curie…Ne lâchez pas l’affaire, le festival off c’est pour vous…Vous pouvez nous la faire en tragique et lacanien, ce sera du théâtre expérimental (risque d’article dans Télérama) ou humoristique (risque d’article dans Vaucluse Matin), mais, en tous cas, si vous avez assez de revenus pour que votre banquier vous octroie un crédit raisonnable afin de louer une salle intra-muros, vous avez toutes vos chances de vous trouver un public dans un théâtre de 49 places. Voyez ça comme des vacances actives, un peu comme le woofing, mais au lieu de travailler à la ferme, il faudra tracter toute la journée sous le cagnard à 40°, boire beaucoup de Pac à l’eau et bien sûr jouer, aussi, durant le créneau que vous aurez pu vous payer. Vous vous ferez plein de copains sympas, on vous paiera des coups, ce sera une belle expérience de vie et il y aura toujours quelqu’un de gentil qui vous dira que vous avez du talent et une attachée de presse pour vous taper mille balles et vous obtenir des articles de blogs qui ont 3 lecteurs.


Je me demande d’ailleurs si le seul en scène pédagogique n’est pas une alternative à l’éducation nationale… Ludique, granularisé (attention, jargon métier: éléments de savoir concassés en très petits morceaux pour être compréhensibles et digestibles), fédérateur…Les programmateurs ne s’y trompent pas , une tournée en milieu scolaire pourrait bien vous tomber dessus.


Avignon ville de culture, ville d’enseignants, vitrine des élus et cadres sup de l'état. D’ailleurs le public des festivals se recrute en majorité dans ces CSP. A l’année, des tas d’expositions, performances et autres sont organisées par des artistes…qui sont en réalité des profs de... collège. Ils ont peur, ils font un métier dangereux, mais ils ont du temps ! C’est un public très courtisé : ils font vivre les expos, les musées, les événements qui répondent à un appel d’offre public qui contient des mots clés (environnement, différence, inclusif, pour tous, éducation, mixité, minorités, vivre ensemble, arbres, eau, culturel), ils sont les grands pourvoyeurs de public “frais” pour les théâtres, aussi, et les cinémas. Cela s’appelle peut-être “la société de la connaissance” ou l’amélioration continue. C’est comme chez Disney, on s’amuse et on apprend (pas taper pas taper). N'hésitez pas à réserver votre AirbnB un an à l'avance si vous voulez réviser vos bases de Maths, d'histoire de l'art, d'anatomie ou préparer votre prochain séjour en Italie avec une cadre commerciale qui vous apprendra avec son accent charmant à faire les pattes sans crème fraîche (merde, on est pas des normands!), vous pouvez même apprendre par cœur, en groupe, un sonnet de Shakespeare avec le directeur du In.


On se demande bien comment c’est possible que le niveau de culture générale soit aussi bas avec toute cette merveilleuse offre culturelle. “La faute aux réseaux sociaux, on scrolle, on zappe d’hypertexte en hyperlien, on ne retient rien ? Ou alors c’est qu’on part de si bas…” Je vous laisse poser vos hypothèses...


Parfois, aussi, dans certains endroits, il y a de vraies pièces de théâtre, avec des mots, du sens, des personnages, une mise en scène, de la lumière, un décors, une idée qui n'est pas le remake d'un film ou d'un documentaire... Il y a même des théâtres dans lesquels en plus on est bien assis et bien reçus, et la compagnie qui joue, en plus, est contente d'être là. Jackpot !


Faites un petit exercice d'imagination. Imaginez qu’une telle, qui parle au premier degré, soit en train de faire un discours au deuxième degré, si vous êtes capable de cela, vous êtes le roi du monde. Vous aimerez Avignon et vous aimerez la vie. Ce sera sur un malentendu, mais bon, qui n’a pas fait de petits arrangements avec la réalité, hein ? C’est ça la magie du théâtre : un perpétuel malentendu. Est-ce nul, est-ce génial ? Si vous avez dans votre entourage un habitué de l’art contemporain, demandez- lui des astuces : il comprendra tout de suite de quoi vous parlez. On rit/on pleure. On apprend /on se distrait. Pour vous faire une idée, visitez la collection Lambert: un chef d'œuvre, un dilemme, un chef d'œuvre, un bug subventionné, un presque chef d'œuvre, un “truc”, re “un chef d'œuvre", etc. C’est une bonne préparation. C’est un très bon exercice pour tester votre plasticité neuronale ou la développer. Si vous craquez, pas d’angoisse ! Dans la région, même l’hôpital psychiatrique est chic : on y interna de force autrefois cette pauvre Camille Claudel, il y a aujourd’hui de nombreux ateliers créatifs à votre disposition…


Si X joue au In c’est intellectuel, si X joue au Off le risque du divertissement affleure. Oui, même si c’est le même spectacle fait avec exactement la même équipe. Vous ne pouvez pas comprendre. C’est un peu comme le sketch des inconnus avec le bon chasseur et le mauvais chasseur…..Au In, on est (bien) payé pour jouer, au Off, on paie pour jouer….Ce n’est pas du tout le même business model…Le plus drôle c’est qu’à part le business model et les effets secondaires de Airbnb, au fond, pour ressentir la folie et la bohème du In d’autrefois, le In vintage, il vaut mieux venir au Off. Parce qu’au In, le bourgeois vient se faire secouer (c’est écrit dans le contrat) mais s’il est secoué un peu fort il crie “aïe” -ici je vous conseille de rechercher (ou vous voulez, je ne suis pas votre mère) quelques exemples d' “incidents” ayant eu lieu durant le In en 2023.

Moi, j’aime bien les mélanges : In/Off/PMU, tout me va !


Avignon, c’est aussi une ville chouette grâce à ses polémiques. Dans le monde il y la guerre, la pollution, la torture, la faim etc….

A Avignon, c'est un peu différent, il y a des préoccupations de type: le stand-up c’est le niveau zéro du théâtre, moi ce que j’aime dans le théâtre populaire c’est quand on ne s’amuse pas. Il y a le bon théâtre populaire et le mauvais théâtre populaire (Jean Vilar mal digéré, ou les Inconnus?), il reste encore pas mal de théâtres et d’églises désacralisés à transformer en théâtre, tiers-lieu, et autres scènes, là je verrais bien un roof-top immersif avec sieste musicale…. Je pense investir dans une cave pour la louer sur Airbnb en juillet... Ou la niche du chien, après tout, c'est très "concept" pour la catégorie "atypique", autant ça marche... L’association du Off mérite-t-elle la fessée ? Les blogueurs ont-ils leur place au club de la presse ? Est-ce qu’on a le droit de faire un théâtre éphémère dans une yourte ? Le théâtre engagé est-il chiant ? Le théâtre non engagé a-t-il le droit d’exister ? Pourquoi la mairie n’envoie-t-elle pas des employés municipaux pour couper les herbes qui poussent sur les trottoirs ? C'est quoi ça, une poubelle, le clochard qui brûle, c'est une performance? Doit-on exécuter les avignonnais qui ne roulent pas en vélo ? N’y a-t-il que des profs, des artistes et des cas sociaux à Avignon ? (si c'est la diversité qui vous fait tripper, vous en trouverez un peu sur les planches-surtout au In), aventurez vous hors des ramparts). Est-ce corrélatif (pause pipi) ? Tiens, il y a avait un théâtre à cet endroit, avant, tu es sûr ? Là aussi ? C'est quoi, ça, un restau ou une friperie? L'IA va-t-elle remplacer les acteurs de doublage? Les théâtres historiques enlèvent-il vraiment la signalétique des théâtres "importés" de la Capitale? (Hercule Poirot est sur le coup.) Est-il avouable d’habiter extra-muros? Quand tu fais la manche, faut-il demander directement 2 euros ou 1euro 99, ou alors carrément laisser les gens choisir? Est-ce que les journalistes parisiens vont voir, parfois, des spectacles extra-muros ? Bonjour, est-ce que vous avez de la ginger beer? Tiago Rodrigues est-il vraiment Tiago Rodrigues ? Y a-t-il un lobby portugais qui avance à bas bruit avec des intentions coloniales?

Et encore tout un tas de trucs passionnants….Sur les Chemtrails, la vie extra-terrestre après la mort, le bon népotisme et le mauvais népotisme, etc…..



Avignon est une ville d'environ 90 000 habitants qui a ses Universités, son aéroport, son tram (a failli avoir son métro), une gare TGV et une gare ordinaire. Des monuments historiques, des collections d'art, des musées municipaux gratuits, des boutiques de tourismes, beaucoup de carrefour city, d'épiceries de nuits qui vendent surtout de l'alcool. Des voiturettes électriques (baladines), des tchouk tchouk comme en Indes, avec un jeune esclave qui pédale pour vous. Bientôt les chaises à porteur ? Nous avons notre PEM qui facilite les allers-retours de pôle emploi jusqu'aux zones commerciales, de la CAF à la patinoire, de mon HLM à l’hôpital ou à la déchetterie. Des SDF pour tous les goûts et toutes les sensibilités -jamais en très bonne état, on voit bien qu'ils ont déjà servi- dont le nombre augmente à vue d'œil et qui agonisent parfois au pied des monuments historiques comme autant de “vanités” qui vous rappellent que la vie de consommateur est fragile. Parfois un être humain se soucie de savoir si oui ou non, ça bouge encore à l’intérieur. Nous avons aussi nos dealers en Ferrari, nos kékés cys et LGBTQH+ (c'est ça le progrès : attentions ici marques de luxe ), nos aristocrates en chaussettes-claquettes, nos quadras mal rasés en costard et basket, avec des lunettes destructurées, nos émules d'Iris Apfeld et celle de Christina Cordula, nos sectes importées des états unis, nos boîtes à livres pas du tout étanches, nos handicapés à roulettes qui restent devant la porte des théâtres et autres lieux inclusifs qui n’ont pas jugé utile de s’équiper d’entrées PMR. Nos teufeurs à chien (super polis, on dirait que certains ont fait un BTS force de vente), nos femmes roms déguisées en musulmanes pour pouvoir faire la manche (cf études sociologiques avant de me traiter de nom d'oiseaux, renseignez vous). Nos rebelles “radicaux” et antisystèmes qui ne crachent pas sur une petite subvention, une résidence d’écriture, un sponsor de bière bio brassée sous les aisselles ou de grossistes de CBD d'importation suisse. Nos jeunes habillés comme nos grands parents qui nous tolèrent, nous autres "les boomers" et parfois même nous laissent la place dans le bus quand on est plié.e.s en deux, claudiquant et munis d’au moins une canne. Nos festivals électro avec gobelets "verts" consignés et label "écoresponsable", mais nous explosent les oreilles avec leurs décibels bio synapsophages, nos machos affichant leur féminisme de circonstance, nos féministes à frange qui prone la sororité inclusive entre femmes de moins de cinquante ans, notre délinquance en col blanc, notre délinquance en baskets, nos Macdonald, KFC, nos boulangeries Marie Blachère elle est pas bonne mais elle est pas chère, nos poubelles inflammables, notre signalétiques aléatoire, nos cyclistes à contresens, nos trotinettes qui marchent au redbull etc.

Oui à Avignon, on a TOUT absolument TOUT comme ailleurs en France et probablement dans le monde! Alors je cesse ici ma liste car elle me fatigue moi-même. Parce qu'à Avignon comme ailleurs en France, on râle, comme des enfants gâtés et on se dispute le "privilège du cœur". Sauf pour ceux qui sont au RSA quand il y a un bug informatique qui "gèle les allocations" #démerdetoiavecça" (mais, ça, ce n'est pas théâtral, ce sera peut-être l'objet d'un autre billet, un jour, en plus si ça se trouve, le responsable du bug est un très fidèle consommateur d'art vivant et je ne veux pas me faire d'ennemi.e.s, moi aussi je suis un.e honnête parasite cuturel.le comme les autres, hein! #enmêmetemps).

A Avignon, la vie est belle parce qu’on a un fleuve qui est rarement en crue (attention, en ce moment, risques sérieux de débordement, quand même), un climat d’enfants gâtés, des idéalistes qui ne sont pas toujours à côté de la plaque. Des méchants pas trop méchants. On a aussi des airs d'Italie, d'Espagne, de Portugal, du Maghreb, des Nems, du curry (pas wurst), du bissap dans les soirées, des Kebabs et de la daube végétarienne, de la paella sans moules, des pizzas à la banane plantain... Et surtout parce qu’on n’a pas besoin de voyager puisque le monde entier vient nous casser les bonbons en échange de ses biftons. On est les papes du tourisme, avec notre gros gâteau pointu et sa ceinture de pierres, nos rues pavées, nos parcs tous mignons, nos magasins fermés déprimants, nos défilés thématiques avec de grandes marionnettes, nos presses qui ferment parce que les loyers augmentent, nos péniches new-âge, nos écoles d'art, nos baronnets, nos héritiers, nos oliviers, nos lavandes, nos déambulations artistiques, notre canicule, notre mairie sous-tutelle, notre demi-point et les rumeurs de téléphérique.... Et pis nous autres, les anonymes un peu fêlés, les mamies en trottinettes, les abonnés de la bibliothèque, les revenus de tout, les venants les partants, les exilés de la couronne que le ciel bleu ne console pas...


dMeine Damen und Herren, kommen Sie herein und begrüßen Sie in der Menagerie

                                                            Adeline Avril







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